Cette page a été archivée.
Information archivée dans le Web à  des fins de consultation, de recherche ou de tenue de documents. Cette dernière n’a aucunement été modifiée ni mise à  jour depuis sa date de mise en archive. Les pages archivées dans le Web ne sont pas assujetties aux normes qui s’appliquent aux sites Web du gouvernement du Canada. Conformément à  la Politique de communication du gouvernement du Canada, vous pouvez demander de recevoir cette information dans tout autre format de rechange à  la page « Contactez-nous ».
La doctrine de la responsabilité ministérielle constitue un moyen cohérent et efficace de favoriser un gouvernement responsable. Les experts consultés dans le cadre de ce rapport soutenaient presque unanimement les concepts et principes clés de cette doctrine. Ils n'avaient pas l'impression qu'on avait fait une entorse à la doctrine de la responsabilité ministérielle (comme il a été défini dans les sections précédentes du présent rapport). Au Canada, le régime de responsabilisation a évolué de telle sorte que le réputé politologue Peter Aucoin a déclaré : « Le Canada dispose d'un certain nombre de mécanismes de responsabilisation de calibre égal, si non supérieur, à ceux des pays auxquels on le compare habituellement ».[39] [traduction] Tel qu'il a été signalé, cette évolution a porté sur la responsabilité politique à l'endroit du Parlement, ainsi que sur la responsabilité des gestionnaires envers le Conseil du Trésor. Dans l'ensemble, le régime actuel de la responsabilité est le fruit d'ajustements effectués au cours de nombreuses décennies, et il se caractérise par :
Les personnes consultées ont quand même souligné qu'il y a matière à amélioration. La pratique de la responsabilité dans certains domaines clés accuse une faiblesse attribuable à la complexité des gouvernements modernes, à la capacité insuffisante dans certaines institutions centrales (comme le Parlement et le Conseil du Trésor), à l'imprécision du concept de responsabilité ou à sa compréhension superficielle dans certains grands domaines de responsabilité et, dans quelques cas, à une volonté ou à un leadership défaillants. La responsabilité doit être renforcée et les pratiques doivent s'améliorer constamment.
Le cadre établi ci-dessous est fondé sur les principes fondamentaux de la responsabilité ministérielle et sur la façon dont ils ont évolué au Canada. Le cadre tient compte des enjeux propres au régime de responsabilité auxquels sont actuellement confrontés le Parlement, les ministres, les sous-ministres et le Conseil du Trésor dans l'exercice de leurs fonctions. Le cadre établit sans équivoque les objectifs que le gouvernement veut atteindre et les valeurs qui présideront à leur réalisation.
Le cadre :
Le gouvernement a commencé à renforcer la responsabilité au moyen d'une série de mesures ambitieuses. Avant de mettre en œuvre le présent cadre, le gouvernement examinera attentivement les recommandations de M. le juge Gomery, de même que celles des parlementaires. Il adoptera une démarche réfléchie et, ce faisant, il réduira les risques de déstabilisation des opérations du gouvernement et permettra de s'attacher aux enjeux véritables auxquels est confronté le régime de la responsabilité.
Le Parlement est maître de ses propres procédures et le gouvernement ne peut dicter une approche à la Chambre des communes ou au Sénat sur la conduite de ses activités. Il n'en reste pas moins que le poids et la proéminence donnés à la fonction de responsabilisation (par opposition au rôle du Parlement qui consiste à représenter les électeurs dans le cadre des activités de promotion menées auprès du gouvernement, à la Chambre ou lors des votes tenus en comité) sont d'une importance capitale.
Lorsqu'on a évalué les pratiques du Parlement en fonction des trois critères fondamentaux du régime de la responsabilité, les experts consultés n'ont pas eu l'impression que des problèmes sérieux se posaient en ce qui a trait au rôle du Parlement, plus particulièrement à l'attribution des responsabilités. Il y a des domaines qui auraient bénéficié d'une plus grande clarté relativement à la détermination des responsabilités, mais cette tâche relève d'abord et avant tout du pouvoir exécutif du gouvernement et non du pouvoir législatif.
Comme il a été signalé, le Parlement dispose de moyens de sanction peu efficaces en cas de mauvaise gestion. Il ne peut appliquer de sanctions personnelles aux ministres (au-delà de la censure politique) et retirer au gouvernement son appui (au moyen d'un vote de non-confiance) n'est une menace réelle que dans le cas des gouvernements minoritaires. Néanmoins, il n'était pas question de modifier la convention selon laquelle le Parlement n'applique pas de sanctions personnelles contre des fonctionnaires. Les sanctions politiques émanant du Parlement entraînent des répercussions réelles, et miner le pouvoir exécutif du gouvernement en faisant intervenir le Parlement dans des sanctions personnelles serait trop coûteux pour notre régime de gouvernement responsable.
L'attention a été portée sur l'inadéquation des mécanismes par lesquels le Parlement tient les ministres responsables, y compris la capacité du Parlement d'effectuer un examen approfondi et la qualité de l'information transmise au Parlement.
Comme en fait foi la Commission Lambert : « Dans notre régime politique, le Parlement doit se trouver à la source et au terme des opérations gouvernementales. Il doit examiner de près et approuver toute mesure législative et toute proposition visant à accroître les recettes ou les dépenses du gouvernement, et surveiller la mise en œuvre par le gouvernement des propositions auxquelles il a consenties. Nous pensons que les parlementaires n'ont pas rempli adéquatement leur mandat de tenir le gouvernement responsable de la gestion des ressources publiques ».[40] [traduction]
Le Parlement s'est prononcé sur cette question. En 1985, on faisait remarquer, dans le Rapport du Comité spécial sur la réforme de la Chambre des communes, qu'aucune des fonctions associées à la structure du comité (examen des prévisions budgétaires et des mesures législatives, enquêtes) n'était accomplie convenablement par les parlementaires en raison de la lourde charge de travail que constituent leur présence dans leur circonscription et les nombreuses autres tâches auxquelles ils consacrent leur temps et leur énergie.[41] En 2003, le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires publiait un rapport intitulé Pour un examen valable : Améliorations à apporter au processus budgétaire, qui signalait de nombreuses mesures que les parlementaires devraient adopter pour renforcer le volet responsabilité de leur rôle.[42] Une étude effectuée par des parlementaires représentant différents partis politiques et coprésidée par Carolyn Bennett, Deborah Grey et Yves Morin a conclu que « le Parlement a perdu sa faculté d'examiner les activités gouvernementales », et que « la plupart des parlementaires avouent être dépassés ».[43]
Enfin, dans son rapport de novembre 2004, la vérificatrice générale a mentionné que les parlementaires aimeraient peut-être prendre en compte « la nécessité d'approfondir l'examen parlementaire des dépenses publiques et de rendre ainsi le gouvernement comptable de ses actions ».[44]
Durant la phase de consultation du présent rapport, les experts ont indiqué que :
Les personnes consultées ont aussi décelé des lacunes dans la façon dont le gouvernement assiste le Parlement dans sa responsabilité d'examen du rendement, à savoir :
Le gouvernement a indiqué sa volonté de travailler de concert avec le Parlement sur les questions de responsabilisation. Dans Éthique, responsabilité, imputabilité : Plan d'action pour la réforme démocratique, le gouvernement convient qu'il faut élargir le rôle des parlementaires et des comités eu égard à l'élaboration de mesures législatives, la modernisation du processus d'examen des prévisions budgétaires, l'augmentation du nombre de comparutions des ministres devant les comités, et l'examen préalable des nominations.[48] Certaines étapes importantes ont été franchies dans le but d'améliorer la transmission de l'information au Parlement, dont :
Malgré les diverses initiatives qu'il a déjà prises, le gouvernement reconnaît qu'il doit faire davantage pour que le Parlement puisse assumer sa responsabilité pour ce qui est d'examiner les dépenses et le rendement du gouvernement. Il faut rehausser la qualité de l'information. Il faut mettre en place de meilleurs procédés d'examen de l'information communiquée. Des mesures d'encouragement plus efficaces doivent être prises pour insister davantage sur l'examen et la responsabilisation dans tout le système. Le gouvernement devra lors de l'exécution de ce programme prôner des rapports francs et ouverts avec le Parlement. La transmission de l'information doit être exacte et complète, et le gouvernement reconnaît volontiers qu'il lui faut être respectueux des demandes du Parlement dans ce domaine et y accorder toute l'attention nécessaire. Le Cadre de responsabilisation de gestion pourra guider les discussions avec le Parlement sur la gestion du rendement; pour sa part, la transmission de données plus opportunes sur les résultats des programmes fera ressortir les points sur lesquels devront porter ces discussions. Le gouvernement agira avec la conviction profonde qu'être responsable constitue une obligation partagée – et que les gestes qu'il fera trouveront un écho dans un Parlement engagé à assumer son rôle et ses responsabilités. Il incombe à tous d'agir dans l'intérêt général pour seconder et favoriser une saine intendance des fonds publics. La culture de la responsabilité qui en résultera doit être maintenue partout et par toutes les parties intéressées.
Lors de l'évaluation des pratiques de responsabilisation du ministère en fonction des trois critères de base d'un régime efficace, la plupart des experts consultés ont estimé que des mesures devaient être prises à divers égards. Les ministres et les sous-ministres doivent mieux comprendre ce dont ils sont chargés, en particulier dans le domaine de l'administration financière. Dans des secteurs cruciaux, il faut accroître la capacité de la fonction publique pour faire en sorte que les ministres et les sous-ministres puissent assumer leurs responsabilités. On ne dispose pas toujours des outils et processus d'information de gestion appropriés. Il faut améliorer certains aspects de la surveillance de la gestion financière. Un leadership plus efficace est nécessaire pour promouvoir davantage les valeurs et l'éthique de la fonction publique et des mesures décisives doivent être prises lorsque des cas de mauvaise gestion sont découverts. Chacun de ces éléments est examiné ci-dessous.
Toutefois, même si on appelait à l'adoption d'un programme d'action complet, on ne demandait pas de changement radical. Le défi n'est pas de recommencer à nouveau et de se diriger dans une autre direction. Il faut plutôt tirer parti des progrès accomplis à ce jour, consolider et renforcer les pratiques exemplaires et accorder plus d'importance et d'attention au rendement en matière de gestion à tous les niveaux. C'est une question de temps, d'investissement et de leadership, mais il faut agir.
Tout système de responsabilisation comporte une exigence essentielle selon laquelle les personnes responsables doivent comprendre clairement ce dont elles doivent rendre compte. Il en va de même des personnes qui leur ont délégué les pouvoirs et qui, par conséquent, ont le droit de demander des comptes. Des problèmes peuvent survenir quand il n'y a pas de compréhension commune claire et précise du pouvoir délégué ou des priorités auxquelles il faut donner suite. Cela peut entraîner de la confusion, de l'inefficacité et des lacunes dans le système de responsabilisation et rendre difficile l'identification de la personne responsable.
Les consultations et la recherche effectuées durant la préparation du présent rapport ont démontré que l'attribution et la délégation de pouvoirs comportaient plusieurs lacunes :
Le gouvernement a déjà pris de nombreuses mesures importantes pour clarifier les responsabilités et la manière dont elles sont comprises par les ministres et les sous-ministres. Par exemple, les guides concernant la responsabilisation destinés aux ministres et aux sous-ministres ont été mis à jour et améliorés en 2003 et en 2004. Le gouvernement a aussi renforcé la gouvernance et la responsabilisation au sein des sociétés d'État.[49]
Le gouvernement a cependant reconnu qu'il fallait en faire plus. Des mesures devront être prises pour clarifier le rôle et les responsabilités des ministres et des hauts fonctionnaires. Il faudra notamment leur accorder le pouvoir nécessaire pour s'adapter au changement et pour en diriger la mise en oeuvre. Autant que possible, il faudra éliminer les zones de confusion concernant les responsabilités. Tout le monde devra savoir qui rend compte de quoi et à qui. Chaque fois qu'un pouvoir est attribué ou qu'une obligation de rendre des comptes est imposée, il faut maintenir et renforcer les principes essentiels de neutralité et de professionnalisme de la fonction publique. Les divergences d'opinion au sujet de la meilleure façon de mettre en œuvre une politique, bien que rares, doivent être réglées d'une manière qui, tout en préservant la clarté de la responsabilisation, n'affecte pas le lien de confiance nécessaire entre les ministres et les sous-ministres, ni le principe démocratique fondamental de l'obligation qu'ont les ministres de rendre des comptes au Parlement.
À cet égard, de nombreux universitaires et des parlementaires ont prétendu qu'il fallait adopter le modèle de l'agent comptable, qui existe depuis longtemps en Grande-Bretagne. Les responsabilités particulières de cet agent comptable et les moyens par lesquels il rendrait des comptes pourraient varier grandement. Le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes a recommandé une version de ce modèle qui inclurait les caractéristiques suivantes[50] :
Il convient de noter que les responsabilités des agents comptables sont très semblables à celles du sous-ministre en conformité avec les politiques du Conseil du Trésor et la Loi sur la gestion des finances publiques. Comme les agents comptables, les sous-ministres sont responsables de la régularité et de l'à-propos en matière financière, de l'économie, de l'efficience et de l'efficacité; des systèmes de gestion et des systèmes financiers pour les programmes ministériels et la propriété publique. En outre, les sous-ministres comparaissent régulièrement devant les comités parlementaires afin de fournir de l'information et des explications sur l'administration du ministère et des programmes qui relèvent d'eux.[51]
Certains croient que le modèle de l'agent comptable convient bien au contexte canadien, et qu'il permettra de clarifier pour le Parlement qui est responsable de quelles décisions administratives, d'accorder aux sous-ministres la « latitude administrative » requise pour exercer pleinement leurs responsabilités en matière de gestion, tout en servant leur ministre, ainsi que de codifier les moyens de régler les positions divergentes entre le ministre et le sous-ministre de manière à clarifier à qui incombe la responsabilité. D'autres se sont opposés fortement à cette idée. Selon eux, les responsabilités et les responsabilisations actuelles ne changent pas réellement, sauf en ce qui concerne la lettre permettant d'outrepasser le jugement du sous-ministre en cas de désaccord. Les critiques du concept estiment que la relation de confiance requise entre le ministre et le sous-ministre serait gravement compromise. Ils sont aussi d'avis qu'il serait extrêmement difficile d'établir une distinction entre les responsabilités du ministre et celles de l'agent comptable. Compte tenu de la rigueur de l'examen parlementaire, les critiques croient que les fonctionnaires impartiaux et professionnels se sentiraient obligés de se défendre et risqueraient de prendre partie sur le plan politique.
Une personne chargée de quelque chose doit non seulement avoir le pouvoir nécessaire pour exercer ses responsabilités, mais elle doit aussi être en mesure de le faire et posséder les capacités nécessaires. Les ministres doivent être convaincus que la fonction publique qui les soutient possède les compétences et les ressources nécessaires pour accomplir les tâches qui lui sont confiées. Des personnes consultées pour cet examen étaient d'avis que les nouveaux employés et gestionnaires avaient besoin d'une meilleure introduction à leur poste afin de pouvoir bien faire leur travail. Dans des secteurs très importants des opérations gouvernementales où travaillent par exemple la collectivité de la gestion financière et de la vérification, la collectivité de l'évaluation des programmes, les collectivités des acquisitions, de la gestion du matériel et des biens immobiliers et la collectivité des ressources humaines, on estimait que des compétences de base devaient être améliorées et, dans certains cas, que des normes de certification étaient justifiées. Des initiatives de recrutement plus efficaces étaient jugées nécessaires pour attirer des talents dans certains domaines opérationnels cruciaux.
La durée du mandat de certains cadres supérieurs suscitait également des préoccupations. Bien que la moyenne du mandat d'un sous-ministre soit de trois années et demie, beaucoup de sous-ministres occupaient leur poste moins longtemps. On se demandait s'ils disposaient d'assez de temps pour mener à terme d'importantes initiatives de gestion. Dans ce contexte, on a soulevé la question des compétences de base attendues des sous-ministres et on s'est demandé si suffisamment d'accent était mis sur les domaines de la gestion et de l'administration au moment de leur sélection. On a jugé extrêmement important le maintien du statut professionnel et non partisan de tous les fonctionnaires, en particulier celui des sous-ministres, dans le cadre du processus de nomination et ce, à tous les niveaux.
Des mesures ont été prises afin de contribuer à la modernisation et au renouvellement de la fonction publique. La Loi sur la modernisation de la fonction publique vise à permettre au gouvernement d'accroître ses capacités et d'attirer de nouveaux talents. Elle aidera à intégrer la planification des ressources humaines à la planification des activités et à établir de nouvelles relations entre les parties patronale et syndicale. Elle réduira le nombre de règles et de processus qui alourdissent la gestion des ressources humaines, tout en sauvegardant les principes essentiels du mérite. La nouvelle École de la fonction publique du Canada rendra vraiment possible l'apprentissage permanent pour tous les employés et aidera le gouvernement à mettre à niveau les compétences des gestionnaires tant sur le plan du leadership que sur celui de l'efficacité des opérations. Les cadres supérieurs seront mieux renseignés sur les attentes en matière de gestion figurant dans le Cadre de responsabilisation de gestionet dans les politiques du Conseil du Trésor relatives à la gestion et ils pourront donc mieux s'acquitter de leurs responsabilités. On améliore en outre les programmes d'échange afin de mettre en application la notion d'institution diversifiée et ouverte comptant sur les nouvelles idées et les innovations.
Dans des secteurs cruciaux de l'administration financière, le gouvernement a commencé à renforcer ses capacités. Il a annoncé qu'il avait l'intention d'élaborer des normes de certification pour les contrôleurs et les chefs de la vérification des ministères. Un programme d'apprentissage de base sera préparé en consultation avec des établissements d'enseignement, des associations professionnelles et des syndicats. Il mettra l'accent sur trois aspects : l'orientation des nouveaux employés, les compétences en leadership pour les gestionnaires et les besoins spécialisés des collectivités fonctionnelles clés, comme celles des finances, de la vérification interne et des ressources humaines. On procède actuellement, sous l'égide du Comité des hauts fonctionnaires, à l'examen des compétences de base de tous les cadres supérieurs pour s'assurer que l'attention appropriée est accordée au choix des dirigeants de la fonction publique.
Dans le cadre de ses initiatives de recrutement et de maintien en poste, le gouvernement s'est engagé à aider la fonction publique à être productive et à fonder son travail sur des principes, tout en demeurant neutre et non partisane. Investir dans le savoir est investir dans l'adaptabilité et cela contribuera à assurer la viabilité et la pertinence de la fonction publique. Le gouvernement mettra donc l'accent sur les compétences de base nécessaires au succès et à une saine gestion. Il favorisera l'innovation et la créativité, qui sont les meilleurs moyens de servir les Canadiens. Renforcer les capacités grâce à un recrutement et à une formation méthodiques permettra d'assurer le renouvellement de la fonction publique et de la rendre plus souple. L'apprentissage continu, qui distinguera la fonction publique, permettra de s'assurer que le système peut s'adapter pour exécuter des programmes et des politiques complexes et donner aux fonctionnaires la confiance nécessaire pour remettre en question les méthodes établies qui empêchent de fournir de meilleurs services aux Canadiens.
La vérificatrice générale s'est dite préoccupée par le fait que le contrôle financier au gouvernement n'est pas aussi rigoureux qu'il le devrait, compte tenu en particulier de la complexité de cette fonction. Certaines autres questions ont été soulevées pendant les consultations. Des participants ont signalé le manque d'information détaillée et présentée en temps utile sur la gestion et les dépenses dans l'ensemble du gouvernement. Ils étaient d'avis qu'il fallait mettre davantage l'accent sur les éléments fondamentaux de la vérification financière, ainsi que sur une approche stratégique de l'administration financière ciblant les secteurs de risque. La capacité de gestion financière et de vérification était considérée comme étant exploitée au maximum partout au gouvernement, ce qui nuisait parfois à la planification et à la prise de décisions. On estimait, en général, qu'il fallait de nouveau insister sur les contrôles financiers et les mécanismes de suivi et de mise en application pour renforcer l'administration des fonds publics.
Des mesures importantes ont déjà été prises pour améliorer la gestion financière :
En soi, une bonne compréhension de la doctrine ne garantira pas l'existence d'un système efficace de responsabilisation. La simple mise en place de mécanismes de responsabilisation du gouvernement à l'égard du Parlement et au sein même du gouvernement ne suffira pas non plus, peu importe la rigueur des mécanismes. Un fort « réflexe de responsabilisation » sera nécessaire de la part de tous les intervenants.
Les personnes consultées ont estimé qu'il fallait d'abord mieux faire connaître et renforcer les valeurs et l'éthique de la fonction publique en donnant des conseils sur la façon de transposer ces principes dans des actes concrets. Elles étaient aussi d'avis que les mesures prises ouvertement et dans des conditions de transparence relative avaient plus de chances de cadrer avec ces valeurs et avec le respect attendu des règles que celles prises isolément.
Pendant les consultations menées pour cet examen, beaucoup de personnes ont été d'avis que le manque de transparence rendait difficiles l'examen des pratiques de gestion et la détermination rapide des risques et des problèmes. En conséquence, on consacre trop de temps à des mesures correctives et pas assez à la prévention. Les personnes consultées étaient d'avis qu'une transparence accrue aux yeux du public était un moyen puissant d'encourager une gestion, une administration et une responsabilisation publique améliorées.
Plusieurs pratiques de gestion des ressources humaines de la fonction publique semblaient nuire au régime de responsabilisation plutôt que d'y contribuer. Certaines personnes ont affirmé par exemple qu'on n'accordait pas suffisamment d'attention aux valeurs et à l'éthique de la fonction publique au moment d'établir les critères d'évaluation et de promotion. D'autres croyaient que le problème était attribuable au fort taux de roulement aux échelons supérieurs, ce qui signifiait que souvent les gens n'étaient plus accessible pour rendre compte de leurs actions et que d'autres personnes devaient le faire à leur place.
Le gouvernement a pris des mesures pour renforcer le réflexe de la responsabilisation. Tirant parti du travail novateur fait par le Groupe de travail sur les valeurs et l'éthique dans la fonction publique, il a publié en 2003 le Code de valeurs et d'éthique de la fonction publique. Des lois sur les conflits d'intérêts, des règles sur l'inscription des lobbyistes et la révision du Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat ont aussi eu des répercussions. Un agent de l'intégrité de la fonction publique a été nommé et une loi visant à protéger les fonctionnaires qui dénoncent des actes fautifs a été présentée à la Chambre des communes en 2004.
Un bon système de contrôle peut être renforcé, tout en augmentant la transparence envers le public. En fait, la transparence, la visibilité et une approche de communication ouverte sont des éléments essentiels à la promotion d'une responsabilisation plus grande à l'égard du public et du Parlement.[53] Dans la mesure où les parlementaires et les Canadiens peuvent accéder directement à l'information concernant la gestion des dépenses et le rendement du gouvernement, ils seront plus en mesure de tenir le gouvernement responsable et moins dépendants des rapports préparés par les ministères et les organismes. C'est pourquoi récemment, le gouvernement a déposé au Parlement Un cadre compréhensif concernant la réforme de l'accès à l'information et a sollicité l'opinion des parlementaires sur cette importante question. Le gouvernement a également signifié son intention d'assujettir éventuellement toutes les sociétés d'État à l'application de la Loi sur l'accès à l'information. Parmi les autres mesures déjà prises, mentionnons la divulgation « proactive » obligatoire :
Ces mesures et celles du plan d'action pour la réforme de la responsabilisation reposent toutes sur les valeurs fondamentales de la fonction publique. Elles accordent une grande importance à l'intégrité et à la confiance, reconnaissant entre autres que, s'ils doivent compter moins sur des règles et des règlements centralisés, les fonctionnaires devront mieux comprendre les valeurs et les buts qui sous-tendent ces règles et règlements. Les valeurs sont renforcées par des pratiques exemplaires, et si les fonctionnaires doivent être habilités à agir, ils doivent percevoir ces valeurs dans les actions de leurs dirigeants. L'examen du rendement en fonction du code de valeurs doit être un élément clé des évaluations et des promotions. Il est tout à fait approprié d'exiger du gouvernement et de la fonction publique de respecter les plus hautes normes possibles. Pour sa part, le gouvernement devrait s'attendre à un rendement éthique maximal de tous ceux qui reçoivent des fonds publics par l'intermédiaire de subventions, de contributions ou de marchés.
Afin de réitérer l'engagement à l'égard des valeurs de la fonction publique, le gouvernement reconnaît les vertus d'une plus grande transparence. On pourrait en faire plus pour rendre le gouvernement plus transparent, tout en assurant une protection appropriée de la vie privée et de la confidentialité. Un gouvernement plus ouvert permettra aux personnes qui font des choix judicieux de le faire avec confiance et conviction et servira de rempart contre celles qui pourraient être portées à faire de mauvais choix.
Même si beaucoup de personnes consultées ont estimé que le régime de responsabilisation fonctionnait raisonnablement bien au gouvernement, elles ont aussi reconnu l'importance des effets dissuasifs de savoir que la situation de mauvaise gestion fera l'objet de sanctions appropriées.
Il est plus facile de juger de la pertinence des conséquences d'un acte ou d'une omission lorsque chaque personne concernée connaît les détails du régime de récompenses et de sanctions. Il est aussi plus probable qu'on agira correctement si on comprend les conséquences liées à son comportement. Des participants à la consultation étaient d'avis que le régime de sanctions n'est ni bien élaboré ni bien publicisé, ce qui le rend par conséquent moins efficace qu'il ne pourrait l'être. On a dit que cette lacune perçue a contribué à donner l'impression au public et aux fonctionnaires que les conséquences associées à une mauvaise gestion sont insuffisantes dans certains domaines.
Dans ce contexte, les participants à la consultation étaient d'avis que l'absence d'une définition claire de la mauvaise gestion s'appliquant aux ministres et aux sous-ministres nuisait à l'efficacité et à la crédibilité du régime de sanctions. Même si de nombreuses définitions intuitives existent, on n'arrive pas à s'entendre sur aucune. Il est difficile de savoir si les mesures appropriées ont été prises pour régler une situation de mauvais rendement ou de mauvaise gestion lorsqu'il n'y a aucun point de référence ou norme clairs, cohérents et évidents à cet égard.[54]
Comme l'a fait observer avec force le Groupe de travail sur les valeurs et l'éthique dans la fonction publique : « La fonction publique doit être animée par une inébranlable conviction à propos de l'importance et de la primauté de la loi, particulièrement de la loi de la Constitution, et par le besoin de l'imposer avec intégrité, impartialité et discernement. Les fonctions ayant trait aux droits, devoirs et objectifs publics des citoyens canadiens ne peuvent être remplies qu'avec légitimité et équité à l'intérieur d'un cadre législatif et de la procédure établie ».[55] Aucune violation des règles ne peut être tolérée au gouvernement, et il faut adopter une approche judicieuse pour régler les cas de mauvaise gestion. Le gouvernement agira alors de manière ferme et décisive. Comme toujours, il faudra être juste et être perçu ainsi. Cela dit, la responsabilisation ne devrait pas se limiter à un simple blâme exprimé publiquement. Les mesures correctrices visant à régler les cas de mauvaise gestion doivent permettre l'apprentissage et l'amélioration. La structure et l'application du régime de sanctions du gouvernement doivent inciter les gestionnaires à se conformer aux directives du gouvernement en respectant la loi et les valeurs de la fonction publique.
Le Conseil du Trésor joue un rôle capital pour ce qui est d'assurer une solide responsabilisation en matière de gestion au gouvernement. Dans son étude, Gordon Osbaldeston a indiqué que, selon les sous-ministres, « leur responsabilité envers le Conseil du Trésor n'était pas aussi claire que celle envers la Commission de la fonction publique » et que « les sous-ministres ne s'entendent pas tout à fait sur la nature de leur responsabilité envers le Conseil du Trésor ».[56] Les conclusions de la récente série de consultations vont dans ce sens. Les moyens employés par le Conseil du Trésor pour déterminer comment les sous-ministres exercent le pouvoir qui leur est délégué ne sont pas très précis. En outre, il n'y a pas non plus d'exigences officielles pour la tenue de séances de responsabilisation visant à permettre au Conseil du Trésor et aux sous-ministres de discuter de la progression de dossiers et de projets.
L'obligation de rendre compte est affaiblie lorsqu'on délègue des responsabilités administratives particulières sans faire état de tâches ou de postes précis. Les politiques de gestion du Conseil du Trésor, qui attribuent les responsabilités et définissent les attentes à l'égard des ministres et des sous-ministres en matière de gestion, ont été élaborées au fil de plusieurs décennies. Il existe des centaines d'instruments de politique et de lignes directrices. Au cours des consultations menées pour le présent rapport, les participants se sont dits d'avis que la complexité des résultats du gouvernement est attribuable, en grande partie, à l'obligation de suivre les règles imposées par le Conseil du Trésor et son secrétariat. Le manque de cohérence et d'uniformité de l'ensemble des politiques de gestion est attribuable en partie à la façon dont elles ont évolué, mais aussi au manque de coordination du processus d'élaboration des politiques. Il en résulte des chevauchements et des doubles emplois, voire parfois des contradictions entre certains instruments. Les règles émanant du Conseil du Trésor sont souvent mal interprétées et on y passe parfois outre, et la plupart des hauts fonctionnaires admettent volontiers qu'ils ignorent tout simplement l'existence de certaines règles. Les personnes consultées ont l'impression qu'il y a trop de politiques qui contraignent inutilement les activités ministérielles.
Pour qu'on puisse tenir les gens responsables de leur rendement lorsqu'ils s'acquittent de leurs responsabilités déléguées, les politiques du Conseil du Trésor doivent indiquer clairement qui doit faire quoi. Le gouvernement simplifiera et rationalisera l'ensemble des politiques de gestion du Conseil du Trésor pour :
Toutefois, le coût associé à un contrôle rigide et centralisé est considérable. Il réduit la responsabilité des personnes chargées des politiques et des programmes et l'efficacité globale d'un régime de responsabilisation. Dans le cadre de tout effort de rationalisation des politiques de gestion, il sera donc précisé clairement que la gestion doit relever du ministère et que la surveillance rigoureuse des systèmes de gestion devra demeurer la responsabilité d'organismes centraux. Il n'est pas prudent de modifier tout le régime de responsabilisation en matière de gestion simplement parce certaines personnes ne respectent pas les règles. Il faut s'assurer que ces règles ciblent correctement les vrais sujets, qu'elles sont bien comprises par tous ceux qu'elles visent et qu'on vérifie de près si elles sont respectées, en particulier dans les domaines où les risques sont élevés.
Les experts consultés aux fins du présent examen s'entendaient presque tous pour dire que les systèmes de gestion de l'information et les processus de collecte de données les alimentant ne permettaient pas au Conseil du Trésor ni à son secrétariat de bien jouer leur rôle de surveillance. Plus d'information et moins de réglementation renforceraient en fait la responsabilisation. Pendant les consultations, des participants ont fait observer que l'élaboration d'information sur la gestion dans l'ensemble du gouvernement était cruciale et nécessiterait un engagement à long terme, et un investissement considérable sur le plan du leadership et des ressources.
Des travaux sont en cours dans les domaines suivants :
Ces outils sont importants pour le renforcement de la responsabilisation relative aux programmes dans les ministères et partout au gouvernement. Les systèmes de contrôle les plus efficaces sont « intelligents », intégrant de façon stratégique des systèmes d'examen et de vérification fondés sur les risques et des systèmes d'information. Les sous-ministres, qui sont responsables de la qualité de la gestion au sein de leur ministère, bénéficieront d'un appui pour l'amélioration de ces systèmes et devront rendre des comptes au sujet de leur utilisation. Les parlementaires recevront de l'information plus complète afin de leur permettre d'assumer leur rôle pour ce qui est d'amener le gouvernement à rendre des comptes.
En tant que conseil de gestion du gouvernement, le Conseil du Trésor a comme principale tâche de présenter clairement aux ministères les attentes du gouvernement en matière de gestion et de donner au Parlement l'assurance que des systèmes de gestion interne efficaces sont en place. Un certain nombre de mesures ont été prises récemment pour que le Conseil du Trésor soit plus en mesure d'assumer cette responsabilité, notamment le Cadre de responsabilisation de gestion. Ce cadre jette les fondements d'un régime de responsabilisation plus cohérent, plus uniforme et plus complet. Il résume les éléments essentiels d'une bonne gestion du secteur public découlant de plusieurs années d'évaluation et d'examen attentifs. Il prend appui sur l'approche relative au rôle du conseil de gestion présentée dans Des résultats pour les Canadiens et les Canadiennes et sur les enseignements tirés de l'Initiative de la fonction de contrôleur moderne.
Le Cadre de responsabilisation de gestion sert à formuler une vision de la saine gestion publique et à souligner les principes fondamentaux de la responsabilisation en matière de gestion. Il sert aussi de fondement pour évaluer le rendement de la gestion dans les ministères, notamment dans le contexte des discussions bilatérales tenues entre le secrétaire du Conseil du Trésor et les sous-ministres. Le greffier du Conseil privé, en consultation avec le Comité des hauts fonctionnaires, tient compte entre autres de ces évaluations pour formuler des recommandations concernant les cotes de rendement des sous-ministres au premier ministre. Les gestionnaires de la fonction publique utilisent aussi le Cadre de responsabilisation de gestion comme modèle intégré pour apporter des améliorations en matière de gestion. Dans l'avenir, tous les rapports sur le rendement de l'ensemble de la fonction publique seront fondés sur ce cadre. Dorénavant, l'objectif est de réitérer le message que les ministres et sous-ministres sont responsables de la gestion de leur ministère, tandis que le Conseil du Trésor et son secrétariat doivent exercer une surveillance afin de s'assurer que les systèmes de contrôle appropriés sont en place et que les pratiques de gestion nécessaires pour utiliser ces systèmes sont suivies continuellement. Sous le nouveau régime de responsabilisation, le Conseil du Trésor se concentrera moins sur les activités particulières auxquelles prennent part les ministres et les sous-ministres. Néanmoins, une participation plus active du Conseil du Trésor marquera un changement dans le credo de gestion voulant qu'on « laisse les gestionnaires gérer » (élément qui était crucial pour la Commission Glassco) pour faire place à une philosophie de gestion visant à « s'assurer que les gestionnaires gèrent bien ».
Des principes fondamentaux guideront le Conseil du Trésor au fur et à mesure que son rôle évoluera. Il fera tout son possible pour éviter d'alourdir la hiérarchie dans le cadre des processus décisionnels. L'habilitation et la responsabilisation doivent être encouragées au plus bas échelon possible. Cela ne peut fonctionner que si toutes les parties reconnaissent les attentes concernant la diligence raisonnable et y répondent. Par conséquent, au lieu de mettre l'accent sur les règles et les processus, il faut insister sur les principes et les résultats, en plus d'une surveillance appropriée par le Conseil du Trésor soutenue par des systèmes « intelligents » de gestion de l'information. L'information sur les attentes et le rendement en matière de gestion permettra davantage que les règles au Conseil du Trésor d'assurer une saine gestion.
Les parlementaires, les ministres et les fonctionnaires ont tous un rôle essentiel à jouer pour appuyer et renforcer le régime de responsabilisation. Dans toute la mesure du possible et pour le bien public, tous doivent collaborer de façon constructive pour s'acquitter de leurs responsabilités, tout en respectant le rôle des autres. La doctrine et les modalités de la responsabilité ministérielle sont essentielles pour le fonctionnement de nos institutions politiques nationales. Il importe donc de bien les définir et de s'entendre sur leurs principes de base.
Plus précisément, pour améliorer l'application et l'exercice de la doctrine de la responsabilité ministérielle, certains principes de base du cadre de responsabilisation doivent demeurer constants. Même dans le contexte complexe et changeant dans lequel le gouvernement travaille, ils demeurent pertinents et guideront le gouvernement lorsqu'il procédera au renforcement de la responsabilisation.